(Français)
Lorsque j’ai demandé à Rémi Dall’Aglio quel titre pourrions-nous donner à sa future exposition, il m’a indiqué Self-Made.
S’il m’a avoué ne pas avoir fait immédiatement — mais j’ai sans doute au fil du temps un esprit déformé — le rapprochement avec ready-made de Marcel Duchamp, il y a, au sein de l’approche de Rémi Dall’Aglio des facteurs qui le rapprochent de cette figure incontournable, particulièrement son intérêt constant pour la science et si Duchamp avait participé au Concours Lépine en 1935 avec ses Rotoreliefs, Dall’Aglio aurait peut être y prendre part avec l’une ou l’autre de ses machines — il travaille actuellement sur une imprimante 3D peu ordinaire — voire sa lampe à arc électrique avec laquelle il produisit d’étonnants photogrammes.
Rémi Dall’Aglio cherche en effet à relier une vision technique et scientifique à une vision sensible du monde en plaçant en quelque sorte le spectateur au centre d’un observatoire de formes et de phénomènes.
Comme il aime à le rappeler, « très tôt, j’ai trouvé comme point d’ancrage l’étude du ciel et des étoiles, origine d’un travail où le tracé, passage du point à la ligne, génère formes et rythmes. Il poursuit : « Inscrit ou volatil, mécanisé ou furtivement capté, le tracé demeure une constante. Il est délégué à la mesure et à la mécanisation. » Avec ses installations mettant en scène des machines, il s’agit autant d’une inscription calculée que d’une observation d’un temps à l’œuvre, la machine étant pour l’artiste « un outil de médiation entre l’homme et l’univers, sans arrière-pensée productiviste. »
Je ne peux m’empêcher de penser que cet esprit de recherche et d’aventure artistique, toujours empreint d’ironie, combiné à ce constant intérêt pour le monde scientifique fut déjà à l’œuvre lorsqu’à l’occasion de l’ouverture de la galerie (en 1989), Rémi Dall’Aglio fut le premier à investir cet espace en s’appropriant une vitrine avec déjà… une étrange pièce motorisée intitulée Réseau courbe, brosse Univers. Une manière de penser que l’art est davantage le fait de retournements, d’imbrications, de constructions que le produit d’une pensée linéaire et uniquement à caractère formaliste.
L’exposition Self-Made, présentée à la galerie jusqu’au 9 mai, réunit deux installations de grandes dimensions (machines avec microprocesseurs qui dessinent à même les murs) ainsi que d’autres œuvres récentes, notamment un ensemble de dessins.
H.B., février 2015
Rémi Dall’Aglio est né en 1958 à Genève. Il vit et travaille à Gajan (France).
Son travail a fait l’objet de plusieurs expositions personnelles à la galerie depuis 1992. Il a été présenté en Suisse par plusieurs institutions importantes, ainsi qu’au Danemark (Louisiana Museum, Humlebaek), aux Etats-Unis (Swiss Institute, New York).
Des œuvres figurent notamment dans les collections du CNAP (Paris La Défense) et du Frac Languedoc-Roussillon (Montpellier).